Luxfer : « Ils nous ont laissé mourir, ils ont laissé l’usine pourrir »
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- Catégorie : Luttes professionnelles
- Mis à jour : lundi 20 juillet 2020 09:14
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Article d'Amandine Cailhol – journal LIBÉRATION le 12 février 2019
Après le refus, mardi 12 février 2019, du projet de poursuite d’activité, l’usine du Puy-de-Dôme spécialisée dans la fabrication de bouteilles de gaz risque de fermer en juin, malgré ses bénéfices. Retour sur la lutte des 136 salariés pour conserver leur emploi.
Encore une. À Gerzat, dans le Puy-de-Dôme, la nouvelle est tombée fin novembre : l’usine Luxfer Gas Cylinders, spécialisée dans la fabrication de bouteilles de gaz à haute pression, va fermer. C’est du moins le souhait de la direction du groupe britannique qui a racheté ce site en 2001. Mais les salariés n’entendent pas se laisser faire. Retour, en dix dates, sur leur lutte pour sauver l’emploi.
26 novembre, l’annonce au réfectoire
Ça s’est passé à la cantine. Les salariés qui étaient présents ont vu débouler un homme au visage inconnu : le manager de transition. Certains l’avaient croisé dans les couloirs quelques minutes avant cette réunion matinale de dernière minute, et lui avaient demandé qui il était. «Quelqu’un que vous n’allez pas aimer», leur aurait répondu le nouveau venu. Entre les tables de cantine, il a laissé le directeur du site annoncer la mauvaise nouvelle : après quatre-vingts ans d’existence, l’usine, dont les industriels Air liquide et Linde sont les deux plus gros clients, allait fermer en juin. Au même moment, un communiqué était publié par la direction. Il y était question de l’«environnement économique dégradé» de cette boîte qui produit notamment des extincteurs pour les pompiers de Paris et de Marseille et des bouteilles d’oxygène pour les hôpitaux. La missive pointait aussi «une concurrence de plus en plus agressive provenant notamment de pays à bas coûts» et affirmait la nécessité de «simplifier son outil industriel en réorganisant son activité» et en la «concentrant» sur ses deux autres sites britannique et américain.
«C’était froid, sans aucune délicatesse, se souvient l’un des 136 salariés de Luxfer. On était incrédules car le carnet de commandes était bien rempli.» «On ne s’y attendait tellement pas, raconte un autre, du service des approvisionnements. Après ça, j’ai été arrêté quelques jours. Le médecin voulait même me mettre sous anxiolytiques.»
Aujourd’hui encore, près d’un tiers des salariés est en arrêt maladie, selon la CGT. «Il faut les comprendre. Il y a un minimum de respect à avoir quand on veut virer les gens qui vous ont fait gagner de l’argent pendant des années. Là ça a juste été du mépris», s’agace Axel Peronczyk, élu CGT au CHSCT de l’entreprise.
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